A quel âge commencez-vous le travail de base du frison (mise en avant, rectitude, équilibre, tension du dos) et combien de temps consacrez-vous à cette première étape du dressage ?

La formation initiale commence à l’âge de trois ans. Le cheval est travaillé trois fois par semaine, le lundi, mercredi, et vendredi. Je commence par longer le cheval en utilisant uniquement un caveçon pour lui enseigner la ligne du cercle et comment répondre à mes demandes à la voix pour le pas, le trot et le galop.
Une fois que le cheval est détendu et obéissant avec le caveçon, je répète le processus avec la selle. En plus de la selle, j’emploie également des rênes fixes, un bungee ou un chambon, ces 3 enrênements sont alors les meilleurs selon la nécessite du moment. Il est essentiel à ce stade de donner au cheval la régularité et le développement musculaire. Bien que chaque cheval soit différent, ces deux étapes de travail à la longe n’excèdent pas habituellement plus de trois mois.

Après cela, il est temps de présenter le cavalier au cheval. A ce moment, ce qui me préoccupe est l’équilibre. Le cheval doit apprendre à porter le poids du cavalier à établir puis maintenir son équilibre avec le cavalier sur son dos. Une fois que l’équilibre est établi, nous travaillons la cadence, la relaxation, tout en continuant à lui donner de la force.

Pendant les six à douze mois suivants nous travaillons les mouvements de base, en diversifiant le travail pour que cela reste amusant pour le jeune cheval. Ainsi, je fais beaucoup de transitions : pas, trot, du pas au trot, du galop au trot, du trot au galop. Pour établir la souplesse dans cette première phase, j’aime faire la cession à la jambe, l’épaule en dedans et quelques appuyers. Le but est que le cheval apprenne à répondre aux aides correspondant à chaque mouvement.
Je commence progressivement chaque chose nouvelle et travaille patiemment avec le cheval jusqu’à ce que ce soit totalement acquis. Je sais qu’il est temps de commencer à rassembler le cheval quand il obéit parfaitement aux aides.

Quel est le programme de travail d’un cheval durant toute une semaine ?

Le cheval est travaillé six jours par semaine. Quatre jours sont consacrés au dressage, un a la promenade et l’autre a l’attelage pour varier. Le septième jour, le cheval est mis au pré une demi-journée.

Quelle est l’alimentation quotidienne de vos frisons, leur administrez-vous un complément alimentaire ?

Un granule avec 12% de protéines est le régime de base de nos chevaux. Chaque jour les chevaux ont également des électrolytes pour les maintenir hydratés,un complément pour les tendons et ligaments des articulations et un vermifuge quotidien. Ils ont du foin trois fois par jour et apprécient des friandises après leur séances d’entraînement.

Préférez-vous le travail en filet ou en bride, quel bénéfice retirez-vous de ces deux embouchures ?

Tous les chevaux commencent avec le filet. Une fois qu’ils ont démontré la perfection avec le filet et se préparent aux niveaux supérieurs, ils entreront alors dans le travail en bride.
Souvent les gens font l’erreur d’employer un mors plus dur ou de commencer en bride trop tôt, particulièrement si le cheval résiste un peu. Ainsi la bride permet de passer rapidement la difficulté bien que le problème n’est pas réellement réglé. Tandis que cela peut prendre plus longtemps, le cheval doit accepter le filet et démontrer la perfection avant que la bride soit employée.

Travaillez-vous vos chevaux en rênes allemandes ?

Je n’utilise pas les rênes allemandes dans l’entraînement quotidien des jeunes chevaux que je forme.
De temps en temps, j’accepte de prendre un cheval au travail pour corriger des problèmes. Si le cheval a développé le muscle sous l’encolure, ne veut pas tendre son dos et a développé la force opposée de ce qui est désiré dans le dressage, alors j’utiliserai les rênes allemandes comme outil pour aider à corriger ces problèmes.

Malheureusement les rênes allemandes ont une mauvaise réputation parce qu’elles ne sont souvent pas employées correctement. Fréquemment les gens les emploieront juste pour bien placer les chevaux plutôt que de monter le cheval bien rond. Le cheval devrait venir de lui-même dans la bonne attitude. Les rênes allemandes peuvent être un outil très efficace une fois utilisées comme une aide et par des cavaliers expérimentés.
Les rênes allemandes ne devraient jamais remplacer le rôle du cavalier qui doit arrondir le cheval par la souplesse de son assiette et de ses jambes. Si les rênes allemandes sont utilisées correctement, elles constituent une frontière qui guide le cheval dans l’attitude appropriée avec bien sûr l’appui des aides du cavalier.

En général, à quel âge ou au bout de combien de temps vos frisons sont-ils prêts à aborder la Haute-Ecole ?

Je sais qu’un cheval est prêt pour le niveau supérieur après l’avoir soigneusement évalué individuellement. J’évalue le développement physique des chevaux, leur développement et attitude mentale vis-à-vis du travail, et les progrès qu’ils ont accompli pendant leur formation de base.
Commencer la Haute-Ecole n’est qu’une étape dans le long et grand processus de dressage des chevaux.

Après que le cheval ait terminé sa formation de base initiale (comme décrit plus haut) et qu’il est prêt, habituellement aux alentours de 5 ans, je commence à aborder le rassembler. Une fois le premier degré de rassembler maîtrisé, nous pouvons alors l’approfondir. Ici encore, la durée que cela peut prendre dépend de chaque cheval.

Tandis que nous travaillons dans le rassembler, je tente également les premiers changements de pied et l’appuyer au trot. La façon dont le cheval se rassemble détermine si nous allons rapidement progresser. On commence cela généralement avec un cheval mature, de 8 ans ou plus, après avoir pu constater qu’il est prêt physiquement et mentalement pour aborder les figures de niveau supérieur de perfectionnement.

Quand vous commencez le dressage d’un jeune cheval, vous pouvez souvent prévoir le temps qu’il lui faudra pour acquérir les bases du dressage. Une fois que le cheval commence à mûrir, c’est là qu’il devient nécessaire de personnaliser l’entraînement de chaque cheval.
Par exemple, comme les frisons sont doués, le piaffer et le passage peuvent être abordés relativement tôt, d’une façon amusante, car ce sont des mouvements qui viennent naturellement et facilement dans cette race. Bien sûr, seul un cavalier expérimenté devrait essayer ce type de travail aux premiers stades du développement. Le but quand on commence ces mouvements sont de renforcer les muscles que le cheval exploitera plus tard.
La préoccupation doit d’abord rester le mouvement en avant. Plus tard, on perfectionnera les mouvements sur place.

A quel âge vos chevaux de haut niveau sont-ils au maximum de leurs possibilités ?

Quand on commence le niveau supérieur à l’âge de 8 ans, 14 ans est le plus bel âge pour les Frisons de compétition car c’est le moment où ils sont les plus épanouis et expressifs.

Un cheval de haut niveau en dressage peut-il être également travaillé à l’attelage sans être abimé ?

Oui, absolument. Mais il faut s’assurer que la conduite est faite correctement de sorte qu’elle n’interfère pas avec le travail monté.
Mes chevaux de niveau international sont attelés une fois par semaine. Pour moi ce travail est une façon de varier les séances d’entraînements du cheval.
Nos chevaux de niveau moins avancés sont plus fréquemment attelés.
Une fois que le cheval est davantage destiné à un niveau supérieur, l’attelage est davantage destiné à les divertir et à leur faire découvrir d’autres environnements que celui de leur entraînement habituel.

Selon vous, quels sont les problèmes particuliers que pose le frison en dressage ?

Le modèle : Recherchez un cheval de conformation plutôt léger et sportif, au lieu du type traditionnel plus lourd. Beaucoup de frisons ont une action de genou allant de haut en bas.

Le galop : Prenez garde à une foulée de galop trop grande. Tandis que cela peut être joli dans les petits niveaux, vous serez défiés de rassembler le galop pour les niveaux supérieurs. Évitez en outre un cheval “rocking-chair” au galop. L’idéal est un galop actif, à trois temps avec un postérieur qui revient rapidement ce qui permet d’ajuster les foulées.

La liberté d’épaule au trot : Souvent, les Frisons ont des foulées rapides au lieu de monter et d’étendre à la fois la foulée et ceci est dû au manque de liberté dans leurs épaules. C’est une caractéristique recherchée pour des chevaux destinés à l’attelage mais ce n’est pas ce que vous recherchez chez un frison destiné à la compétition de dressage car vous aurez des difficultés pour les allongements.

Le pas : Recherchez un pas ample à quatre temps bien marqués. Les postérieurs devraient dépasser d’au moins une empreinte la trace des antérieurs. Il y a beaucoup de frisons qui manquent d’amplitude dans le pas.

Arrière-main et ligne du dessus : Puisque les frisons ont été à l’origine élevés comme chevaux d’attelage, ils ont souvent des postérieurs qui tendent à être campés, légèrement derrière eux plutôt que dessous, ce qui a comme conséquence une poussée vers l’arrière. Recherchez un cheval qui se déplace sous son centre de la gravité. Sachez qu’en outre un cheval avec suffisamment de force dans sa ligne du dessus et plus particulièrement le rein peut compenser et pouvoir envoyer l’énergie vers l’avant et le haut.

L’impulsion : En essayant un frison, assurez-vous qu’il est sensible aux aides et qu’il se porte naturellement vers l’avant. Beaucoup de Frisons ne répondent pas facilement et rapidement aux jambes.

Quel mouvement le frison a-t-il le plus de difficultés à exécuter ?

À mon avis, les changements de pied en l’air sont difficiles aussi bien que le galop rassemblé, rendant de ce fait les pirouettes au galop également problématiques.
L’appuyer au galop peut être également difficile. Parfois le Frison ne déplace pas ses membres aussi rapidement que d’autres races .
Selon le cheval, le trot allongé peut poser des problèmes. Si le cheval manque de liberté d’épaule, vous devez travailler deux fois plus dur pour libérer les épaules et obtenir la pleine extension.

Cependant, en 18 années de travail avec la race, j’ai constaté que ces points difficiles diminuaient légèrement car la sélection de la race est de plus en plus concentrée sur les aptitudes en dressage.

Dans quel mouvement a-t-il le plus de facilité ?

Le piaffer et le passage sont de loin les plus faciles et naturels pour le frison, je crois que c’est bien cela qu’il fait le mieux !

Le trot allongé du frison peut-il être comparable à celui d’un cheval allemand ?

Si le trot allongé est exécuté correctement, le frison peut y parvenir aussi bien qu’un cheval allemand. C’est un mouvement difficile à obtenir des Frisons car ils manquent parfois de liberté d’épaule.

Au cours des années, les chevaux allemands ont été spécifiquement sélectionnés pour les allongements, alors que la race frisonne est plus ou moins restée comme elle était il y a 100 ans ; sélectionnée pour un travail plus rassemblé. Je trouve qu’il est intéressant de se préoccuper de leur capacité pour les allongements.
Les chevaux allemands ont perdu certaines de leurs capacités naturelles pour le piaffer et le passage.

Les Frisons ont les capacités naturelles pour le piaffer et le passage, et les éleveurs se concentrent pour développer les allongements. La question est de trouver le bon mélange.

D’après-vous, pourquoi les changements de pieds posent souvent problème avec ce cheval ?

Je reçois plus d’appels téléphoniques au sujet de cette question que toute autre !
Si vous demandez à la plupart des chevaux en liberté de changer de direction au galop, ils changent facilement de pied. La plupart des races de chevaux sont très agiles et peuvent changer de pied sans hésitation. Cependant, le frison est unique. Si vous le faites galoper librement et que vous lui demandez de changer la direction, il peut changer de pied devant, mais pas derrière et cela l’obligera très probablement à repasser au trot.

Quand un Frison galope, son action de genou donne l’illusion qu’il relève l’avant-main, alors qu’en réalité son poids n’est pas correctement reporté de l’avant vers l’arrière. Ceci est dû à la stabilité et régularité de ses mouvements et ce peut être difficile d’obtenir une réponse rapide des postérieurs afin de changer de pied au galop.
Ceci peut être un point négatif comme positif. La régularité et la cadence naturelle du Frison font de lui un grand cheval pour un cavalier commençant le dressage et qui désire faire de la compétition dans les petits niveaux. Une fois qu’il est temps de passer au travail de niveau supérieur, cette même régularité peut engendrer beaucoup de travail pour qu’il soit prêt à effectuer des mouvements agiles tels que le changement de pieds en l’air.

Le dressage du frison se rapproche-t-il davantage de celui d’un lusitanien, d’un lipizzan, d’un cheval allemand ou autre ?

Les capacités des Frisons pour le dressage sont pour la plupart similaire a celles du Lusitanien, du Lipizzan et de l’Andalou par ce qu’ils font tous partie de la famille des chevaux baroques. Vous pouvez retrouver les caractéristiques du Frison dans chacune de ces races.

En Europe, le frison est rare en compétition (toutes races) de dressage de haut niveau, qu’en est-t-il aux Etats-Unis ?

C’est encore rare, toutefois cela se développe de plus en plus !

Comment vous classez-vous par rapport aux autres races en compétition officielle de dressage ?

On me pose beaucoup cette question. Si vous présentez des Frisons en concours officiel toutes races, vous êtes provocant. Le Frison n’est pas un cheval traditionnel de dressage ; donc, il y a une plus grande pression pour que le cavalier démontre que le cheval peut effectuer les mouvements imposés aussi bien, sinon mieux, que les races traditionnelles.
Il est décevant d’entendre des personnes dire : « C’est un mauvais juge» ou « Ce juge n’aime pas les Frisons ». Ces gens trouvent trop souvent des excuses à leur manque de compétence.

Mon expérience est qu’ en travaillant les Frisons correctement, en leur faisant exécuter les mouvements qui sont difficiles pour eux comme ceux qui leur sont faciles, vous pouvez constater le résultat positif en compétition.
Il faut savoir que les concours de dressage n’ont pas été conçus pour le Frison mais qu’il existe beaucoup de concours uniquement destinés à la race.
J’ai choisi de me présenter en concours officiels toutes races parce que je pense que les juges sont justes. Si j’ai fait le nécessaire pour préparer un cheval et qu’il a la capacité d’exécuter les mouvements imposés, je trouve généralement la notation des juges convenable.

Alors la question devrait être : Est-ce que tout cheval peut faire de la compétition de dressage ?
Seul le cavalier peut y répondre : Pouvez-vous monter à cheval chaque jour, combien pouvez-vous consacrer aux leçons et à l’entraînement qui vous permettra de suivre en compétition ? Et avez-vous un emploi du temps qui vous permet un sérieux suivi pour la compétition ?

Connaissez-vous des cavaliers en Allemagne ou ailleurs qui travaillent le frison au niveau Grand Prix ?

A l’heure actuelle, je ne sais pas qui concourt avec des Frisons en Grand Prix. Un bon nombre de gens dressent des Frisons à certaines figures de Grand Prix telles que le piaffer ou le passage par ce qu’elles viennent facilement au Frison. On voit souvent cela dans les présentations. Ce que je ne vois pas ce sont des reprises ou tous les mouvements sont enchaînés. Je ne vois pas non plus de gens faire travailler les figures de Grand Prix qui ne viennent pas facilement au Frison.
Pour moi, c’est là que le dressage devient vraiment amusant et attrayant. C’est une telle récompense d’avoir surmonté ces faiblesses de telle sorte que le cheval soit brillant dans tous les mouvements.

Que pensez-vous du dressage du frison pratiqué aux Pays-Bas ?

A chaque visite que je fais en Hollande, je suis heureuse de voir tant de Frisons dans le circuit de la compétition.

Que pensez-vous de la modification progressive de la race vers un frison plus « sportif », ne va-t-on pas perdre progressivement les caractéristiques du vrai frison baroque ?

Et bien, en tant que cavalière de compétition de dressage, je fais évidemment bon accueil aux changements. Mais, je ne suis pas égoïste au point de perdre les véritables qualités du Frison baroque où les voir diminuer car j’aime cette race de chevaux.
Je préférais travailler plus dur pour dresser un cheval baroque de type plus lourd plutôt qu’un cheval de sang qui a perdu ce tempérament merveilleux que je n’ai trouvé dans aucune autres races. Ce sont les Frisons fait pour le dressage, leur tempérament honnête et affectueux, couplé à leur potentiel pour la grandeur que j’admire le plus chez la race.

Selon vous, quelles sont les lignées les plus prédisposées au dressage ?

Je ne me réfère pas aux papiers ou aux lignées. C’est seulement que je n’ai pas le temps de faire les recherches appropriées.
Les chevaux les plus adaptés pour le dressage sont ceux qui ont le cœur et l’esprit pour le dressage. La personnalité, le tempérament et l’attitude au travail viennent d’abord, ensuite la conformation du cheval. Dans la plupart des cas ceci provient de l’étalon, avec lequel j’ai d’ailleurs travaillé (à Proud Meadows).
J’ai eu des chevaux avec une bonne conformation mais qui n’étaient pas disposés à effectuer le travail. Réciproquement, j’ai eu des chevaux qui n’étaient pas parfaits dans leur conformation qui pourtant avaient un cœur d’or et étaient disposés à travailler dur.

Pensez-vous que les chevaux de dressage du FPZV sont meilleurs que ceux du FPS et si oui pourquoi ?

C’est important d’avoir deux organismes qui soutiennent la race chacun à sa manière. Le FPS maintient l’histoire et les origines qui font la spécificité du Frison. J’ai un grand respect pour le FPS.

Le FPZV a joué un grand rôle dans le développement du Frison de dressage de compétition. Il fonctionne actuellement en collaboration avec la Fédération Nationale de Dressage en Allemagne.